En tension entre aspirations ecclésiales et rigueur académique, la théologique pratique se repositionne. En tenant compte en particulier que «l’essentiel, pour nos contemporains, c’est de voir comment harmoniser sa vie avec Dieu, ou plutôt avec la représentation qu’on se fait de Dieu». Élise Cairus est théologienne, docteure en théologie pratique de la faculté autonome de théologie protestante de l’Université de Genève.

La théologie pratique, qui comprend divers champs d’application (liturgique, catéchétique, homilétique, accompagnement spirituel), étudie l’action du Christ dans le monde. Elle se fonde bien sûr sur l’Écriture, mais tient aussi compte la vie des croyants, qu’ils fréquentent une Église ou qu’ils soient plus distancés des institutions. Elle est toujours en tension entre recherche scientifique et intérêt ecclésial, ce qui la rend trop intellectualisante du point de vue des Églises, et trop pragmatique du point de vue des Universités…

Le constat est le suivant: on ne peut plus dire, avec Friedrich Schleiermacher, que la théorie, ou la théologie, précède la pratique, ou la vie quotidienne. La théologie n’a plus pour but de dicter sa conduite à l’Église et à ses fidèles. L’ère est au témoignage personnel. On accorde en effet beaucoup plus d’importance aujourd’hui à ce que les gens croient véritablement, à ce qui les habite au plus profond d’eux-mêmes, à ce qu’ils vivent intérieurement, à leur affectivité. De même, l’appartenance confessionnelle est moins marquée, d’une part par les avancées du mouvement œcuménique qui a permis de mieux se connaître les uns les autres et de s’apprécier mutuellement, d’autre part par la plus grande fréquence des mariages mixtes.

L’essentiel, pour nos contemporains, c’est de voir comment harmoniser sa vie avec Dieu, ou plutôt avec la représentation qu’on se fait de Dieu. Cette représentation particulière, qui trouve son origine dans son passé, dans son enfance, dans son éducation, dans son vécu, renvoie inévitablement à telle ou telle réalité de Dieu. En quel Dieu croit-on? De quel Dieu parle-t-on? S’agit-il d’un Dieu juge, autoritaire, tout-puissant, lointain, proche, vivant, d’amour, trinitaire, unique?… De même, l’agnosticisme, ou même l’athéisme sont marqués par une certaine représentation de Dieu. On est athée d’une telle conception du Tout-Autre, comme on dit souvent actuellement, tellement Autre qu’on n’arrive pas à entrer en lien avec Lui et donc à se reconnaître dans l’une ou l’autre religion.

Cet extrait provient de l’article «Les Églises, entre pratique et théologie» d’Élise Cairus. Il est disponible dans le n°46 de la Revue des Cèdres: L’Eglise, pour y venir.

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