Il existe, de manière frappante, des liens entre religion et sport. Dans cet extrait d’article, Dimitri Andronicos, co-directeur de Cèdres Formation, questionne ces ressemblances, tout en mettant en exergue ce qui reste inconciliable entre les deux.

Il est de mise de faire un parallèle entre la religion et le sport selon quelques ressorts attendus autour de ce qui leur est commun. Certaines similitudes, assez objectives à première vue, nous engagent bel et bien dans cette voie. Il se peut aussi que ces deux instances se rejoignent autour d’une ritualité, ou encore d’un ensemble de pratiques et d’émotions qui côtoient l’extase, une profonde tristesse, ou la plus sincère des dévotions. Sans compter les imprécations et les prières sans nombre qui entourent les compétitions sportives […]. De manière assez conventionnelle, le sport est considéré comme une quasi-religion et y puise une certaine gravité. Ne serait-ce pas justement le sens de cette association ? La gravité… Un effort en quête de sa propre profondeur ? En effet, cela vient d’abord du vocabulaire utilisé qui enrobe le sport d’un prestige martial et religieux. Les narrations autour de l’abnégation ou encore du dépassement de soi y sont constantes, et le courage passe aussi par le salut de la victoire ou par la réconciliation de l’exploit. Cela prend alors souvent les aspects d’une souffrance sublimée du corps poussé à sa limite, puis dépassé, et finalement purifié. Il s’opère une alliance entre le sport et la religion justement dans cette liaison narrative pour lui donner le sens du sacré, le faire entrer dans une autre dimension. […]

Cela dit, ce rapport à la religion, s’il est tangible, reste superficiel. Le lien au religieux s’appuie sur un ensemble de rites, de références et même de prières, et si c’est suffisant pour soutenir la crédibilité du jeu, ça ne l’est pas pour saisir, même de loin, ce que la religion (ici chrétienne) vient mobiliser plus spécifiquement. Et si le sport se vit comme une religion, il ne le vit que par analogie. Le sport gagne en profondeur dans la même mesure où la religion se vide de son sens. Et c’est là que la religion lui résiste, alors que les deux instances se découvrent comme incommensurables l’une à l’autre. La victoire si importante en sport, associée à la force, la puissance et la santé, n’est plus valorisée de la même manière dans une perspective chrétienne. Au contraire, les logiques transparentes de la gloire et de la victoire dans le sport ne trouvent aucun écho dans l’Évangile. En Col (2,8-23), le Christ triomphe des autorités dans le cortège de sa croix, il les expose pour ce qu’elles sont : dérisoires et temporelles. Toute victoire est en ce sens futile et sans fond et le sport n’y échappe pas. Il ne s’agit pas de dire que le sport lui-même est futile, c’est en ce qu’il se donne une profondeur qu’il le devient, c’est justement lorsqu’il se donne la dignité d’une religion qu’il se perd.

 

Cet extrait provient de l’article « Le sport et la religion, pour renoncer à la victoire », de Dimitri Andronicos. Il est disponible dans le n°49 de la Revue des Cèdres : Le sport, ma foi.

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