Alors que l’usage populaire du mot « apocalypse » évoque l’idée sombre de catastrophe, de changement brutal ou d’irréversibilité, son étymologie et son usage dans la tradition judéo-chrétienne s’attachent plutôt à l’idée de dévoilement, de révélation et de lumière. Littéralement, il s’agit de mettre à distance ce qui obscurcit, masque ou couvre. Dans cette idée, les grandes traditions chrétiennes ont opté pour une interprétation optimiste de l’idée de fin des temps. […]
Elles ont rejeté d’une part les doctrines du progrès qui prétendaient forcer le destin de l’humanité dans un bonheur plus ou moins contraint. Mais elles se sont aussi écartées de l’idée d’un éternel recommencement qui laissait peu de place à un engagement humain lui permettant d’améliorer sa propre condition. Elles ont suivi un chemin périlleux qui consistait à tenir en tension la délivrance et la persévérance. Elles ont refusé toute promesse incongrue et toute démission prématurée. Elles ont écarté toute illusion de maîtrise et toute tentation d’impuissance. Elles ont tracé une voie marquée par un solide rappel de la liberté. Celle des hommes. Celle de Dieu.
Et c’est sans doute ce dernier élément, la liberté d’échapper à tout pronostique, qui constitue l’essentiel de ce que la tradition chrétienne peut encore sauver aujourd’hui.
Cet extrait provient de l’article « Le retour de l’apocalypse » de Jean-Christophe Emery. Il est disponible dans le n°51 de la Revue des Cèdres : Sauf le monde